FAUT-IL FORCER LES ADOS À PARTIR ?

LES ADOLESCENTS ET L’EXPATRIATION

Partir en famille pour les expatriés, c’est l’assurance de faire bloc à plusieurs face aux changements et surtout de conserver ce cocon protecteur. Oui, mais si un ou plusieurs ados sont de la partie, tout se complique. En raison des tourments très spécifiques de son âge, l’ado expatrié n’envisage pas un départ à l étranger sans beaucoup d’appréhensions.

LA DIFFICULTÉ DE L’ADO EXPATRIÉ

Il n’est certainement pas facile pour l’ado expatrié, en proie avec les grands torrents d’énergie qui le traversent, de se confronter à une vie toute nouvelle et déstabilisante. Le grand révolté qu’est l’adolescent cherche en réalité sa place dans le monde et la mobilité internationale qui bouleverse ses repères n’est pas la meilleure chose qui puisse lui arriver !

La grogne adolescente

Si un ado exprime une forte grogne à l’idée de partir vivre à l’étranger, c’est d’abord parce qu’il y voit la rupture avec ce qui constitue souvent le centre de sa vie : ses proches amis ou sa « bande ». On le sait, les ados aiment la tribu, qui les façonne autour d’un mode de vie propre à leur génération : look vestimentaire, goûts musicaux, sorties… La force de cet attachement explique la première réaction d’un ado expatrié, souvent violente, à l’idée de partir au bout du monde. C’est en sorte un petit monde qui s’effondre, à un âge où l’on se sent, secrètement, mais profondément vulnérable.

Le mécontentement qu’un ado expatrié exprime est donc légitime, car les sentiments éprouvés à l’adolescence sont particulièrement intenses, et les ruptures forcées n’en sont que plus douloureuses. Les ados ont besoin que leurs attachements durent, au risque d’éprouver plus tard un manque de confiance dans leurs relations, et une certaine frilosité à s’en créer de nouvelles. À cet égard, la nécessité pour l’ado de maintenir une continuité dans ses relations après un départ est très importante : mails, Skype, courriers, les moyens modernes ne manquent pas.

Chez papa maman ?

Autre point important qui va intervenir chez l’ado : la peur de se retrouver dans le giron familial. Le passage de l’adolescence sert à s’émanciper de la famille, et cette distance est nécessaire. Or, partir en famille resserre les liens, ce qui équivaut pour l’ado expatrié à une cohabitation qui peut se révéler parfois électrique. Lui qui se bat pour s’affirmer comme jeune adulte, le voilà qui retourne en arrière à plus d’un titre. Il est de nouveau soumis à cette autorité parentale qu’il conspue et doit remettre les compteurs à zéro au niveau de sa construction identitaire. Nouveaux amis, nouvelle langue, scolarité différente : tout est à refaire et le met en situation de s’adapter, d’être compris, accepté… Autant dire qu’il s’agit d’un frein temporaire dans son évolution qu’il peut mal accepter. Il faut en moyenne 6 mois, quand tout se passe bien, pour qu’un ado expatrié crée de nouveaux liens et commence à s’intégrer au pays d’accueil. C’est au prix de cette adaptation qu’il commence à bénéficier pour plus tard, des bienfaits de son expatriation : horizons et intérêts plus larges, grande adaptabilité, choix plus large pour sa vie professionnelle…

PARTIR OU RESTER ?

Pour un ado en pleine crise, il peut ne pas être souhaitable de tenter l’aventure de l’expatriation. L’écoute des parents est importante pour déterminer s’il n’est pas mieux pour lui de rester dans son pays d’origine, auprès de grands-parents ou dans un pensionnat.

Les psychologues spécialisés dans les questions de l’expatriation déconseillent aux Français de l’étranger de soumettre leurs adolescents à trop d’expatriations répétées. Un enfant expatrié une fois dès l’enfance, puis de nouveau à l’adolescence, perdra les repères identitaires des jeunes de sa culture natale. S’il s’est culturellement bien acclimaté à ses expatriations, l’ado expatrié compense ces manques par son ouverture au monde en développant plus de tolérance, de compréhension, et acceptation de l’autre.
Néanmoins, les déplacements répétés sont déconseillés, car ils perturbent la capacité à créer plus tard des liens durables. Ces enfants, sortis du cadre familial, n’auront jamais connu de relations stables dans le temps, ce qui va influer sur leur caractère. Ils auront souvent développé des capacités d’adaptation remarquables, qui leur permettront de se débrouiller dans n’importe quel contexte, mais souffriront d’un manque de profondeur dans leurs relations.

Vivre ailleurs ?

Par ailleurs, il peut être difficile de motiver un ado pour aller vivre dans un autre pays. Certains sont tentés par l’aventure, tout en exprimant le contraire. Car ils ne veulent pas avoir l’air d’être celui qui suit encore ses parents tout en étant secrètement excité à l’idée d’aller découvrir un nouveau pays et de nouveaux horizons.

S’expatrier avec toute la famille au complet n’est pas forcément une bonne idée, quand les enfants ont atteint un certain âge. Une séparation peut être préférable à une adaptation difficile sur place. Tout l’équilibre familial, déjà mis à rude épreuve, peut souffrir du mal-être d’un ado, voir même provoquer un rapatriement. Les parents expats qui se retrouvent en difficulté ne doivent pas hésiter à trouver de l’aide auprès d’un spécialiste, comme le psychothérapeute pour expatrié. Les difficultés peuvent, de fait, commencer à s’aplanir, dès que le dialogue se restaure.